Il traine la patte, un sac de course à la main. Quelques œufs frais et de la brioche pour le petit déjeuner des clients présent au Bed and Breakfast. Vu le regard que son pote lui a jeté y'a de ça une heure avant qu'il ne parte, il a bien compris qu'il devait prendre son temps. La gamine est chez une copine il semblerait que Jackson ai besoin d'un moment d'intimité avec sa fiancé. Il compte bien leurs laisser trois ou quatre heures en s'arrêtant dans un parc ou dans un bar parce que s'il y a bien une chose qu'il ne veut pas, c'est tomber nez à nez avec sa frangine en train de le faire. Beurk. Rien que l'idée le débecte. Il traverse la route et prend à droite pour se retrouver face à face avec... Ava. Merde, elle est plus belle que jamais. Il reste là quelques secondes, son regard qui vient accrocher le sien. Et d'un coup, il sent son myocarde se contracter dans sa poitrine. Quand elle l'a quitté, il n'a pas dormi pendant des jours, il était méconnaissable. Il a eu mal au bide pendant des mois. Quinze ans. Ca va faire quinze ans et il a pourtant le sentiment misérable que c'était hier qu'elle l'a planté. Parce que tout lui revient en pleine gueule. La rancœur surtout. Amère solitude. Il a pas demandé de nouvelle. Jamais. Il a simplement agi comme si elle n'avait jamais existé. C'était plus simple pour lui d'ignorer que d'affronter.

Il l'aurait pourtant aimé à jamais si elle lui en avait laissé la possibilité.

Son regard fini par tomber sur ses chaussures et il passe devant elle. Il n'est pas prêt. Il ne veut pas. Putain. C'est pour ça qu'il voulait pas revenir en ville. C'est pour ça qu'il ne voulait pas accepter la requête de sa sœur dans un premier temps. Edenton est une petite ville et des moments gênants comme celui ci, il en connaitra d'autres. Il est pas vraiment revenu. Il refuse de s'installer officiellement en ville, préférant avoir le cul entre deux chaises. Prêt à filer à la moindre altercation. Eux deux dans la même ville, ça peut pas fonctionner, qu'on s'le dise. Pas pour lui. Pas comme ça. Pas sans faire semblant. Pas sans être malheureux comme un chien.

@Daniel Porter

Un café à la main, sa silhouette qui se redresse après avoir salué un maître et son chien, petit patient déjà parfaitement remis, c'est son regard qu'elle croise de l'autre côté de la route. Son sourire se fige une seconde, elle se tourne vers l'homme pour lui souhaiter une bonne journée. Mais ce sont d'autres souvenirs qui la submergent brusquement. L'oublier. Elle l'avait fait, au fur et à mesure que les mois et les années s'étaient écoulées, après qu'elle l'ait quitté sans une explication, l'abandonnant au pire moment qui soit. Mais Caroline la lui avait dite cette vérité qui avait fini de la convaincre de fuir. Toute future mariée est prise de doute avant le jour J, mais elle... il y avait son père, déjà, ce mauvais exemple du couple imparfait, et les mots de cette amie n'avaient fait que faire germer les craintes les plus fourbes qui la torturaient depuis un moment. Sensation douloureuse d'avoir été trahie. Sentiments abyssales qui l'avaient laissé pleurer sans qu'elle ne dise un mot de ce qu'elle pense être la vérité. Elle n'a jamais voulu en parler, s'appesantir sur ce qui avait bien pu se passer. Et puis, le seul avec lequel elle aurait pu avoir envie de le faire s'était finalement envolé, disparaissant loin d'Edenton. Et s'il revenait à l'occasion, elle le savait pas Jackson, ils ne s'étaient jamais recroisés.

Pas jusqu'alors. Pourtant, son ami d'enfance le lui avait soufflé au détour d'une conversation, qu'il était de retour pour quelques temps. La même où il lui avait demandé d'être son témoin à son mariage, décision qui lui faisait plaisir, mais... Elle n'était pas idiote, la brune, elle a bien conscience que sa future épouse ne sera pas enchantée de l'apprendre. Trop de souvenirs viennent les envelopper, tous en lien avec Dany. Celui-là même que le destin la pousse à croiser, alors qu'il traverse et regarde ses chaussures... lui, le frère de la future mariée, celui pour lequel son cœur a manqué un battement l'instant d'avant. Comme si un ange avait suspendu brièvement sa respiration lorsqu'elle avait croisé son regard. Mais surtout celui qu'il faudra bien croiser au mariage. Tôt ou tard. Elle hésite. Il a sûrement raison, c'est plus facile de faire "comme si". Mais ça va faire 15 ans, et pour son ami, elle est prête à faire un effort. Elle pivote, sa chevelure glissant contre ses joues, soulevée légèrement par le vent du jour qui sinue sur sa peau.

« Tu comptes vraiment faire comme si on ne se connaissait pas, Dany ? » qu'elle souffle, l'ombre d'un sarcasme involontaire s'attardant sur sa langue. Le temps est passé. Personne ne les observe. Personne ne cherche à savoir ce qu'il va pouvoir se produire à la fin de cette rencontre imprévue.

L'amour n'est définitivement pas fait pour lui. Il le sait aujourd'hui, il avait joué le jeu et perdu. Echoué lamentablement. Il semblerait qu'il n'ait pas eu toutes les règles avant de commencer la partie en même temps. Elle avait piétiné son cœur sans se soucier une seconde de ce qu'il avait pu ressentir ce jour là. Pendant des jours, il avait attendu une explication, qu'elle se pointe devant sa porte en lui disant simplement qu'elle avait flippé et qu'elle l'aimait encore. Rien. Il était visiblement si insignifiant à ses yeux qu'elle n'avait pas daigné lui offrir ces mots. Alors il est parti lui. Il en avait ras le bol d'être observé avec pitié. Les regards compatissants, les mots de soutien. Merde. Il avait pas besoin de ça. Et tourner la page, il ne pourrait le faire qu'en quittant la ville. Alors il était parti sans rien dire à personne à part sa frangine. Elle a bien essayé d'le retenir, de lui dire qu'il pouvait pas fuir. Qu'ça reviendrait le hanter. Et ce soir, quand leurs iris se croisent, il se retrouve quinze années plus tôt. Comme un con à attendre au pied de l'autel, excité et plus heureux que jamais. Certains vous diront qu'ils étaient trop jeunes. D'autres qu'ils étaient trop différents. La vérité, c'est qu'personne ne sait rien. Personne ne comprend le vide abyssal dans lequel elle l'a plongé pendant des années. Personne ne comprend qu'aujourd'hui encore, les cicatrices de cette rupture sont là. Béantes.

Et elle interpelle Ava. Elle ne pouvait pas simplement jouer le jeu. Simplement faire comme s'ils ne se connaissaient plus. Il avait dans l'optique de faire pareil au mariage et l'éviter sagement en picolant dans son coin. Ca va être beau d'ailleurs cette histoire, sa sœur qui lui a demandé de faire un discours. Le thème : l'amour. L'expert risque de ne pas être le plus crédible. Il s'arrête une seconde et continue de lui tourner le dos. Il se donne un peu de contenance et se tourne vers elle : Ava  ? Tiens, je t'avais pas reconnu.  Foutaises. Et elle le sait. Elle sait qu'il ment. Pour blesser peut être, ou encore pour essayer d'lui faire croire qu'il est passé à autre chose. Qu'elle n'existe plus. t'as changé. Pas tant que ça non plus. Elle s'est même embellie avec le temps la garce. Lui, il aurait clairement préféré qu'elle soit devenu laide. Si, ça aurait faciliter la tâche à Dany.

@Daniel Porter

Il se fige quand elle lui souffle ces mots. Pas tout à fait certaine qu'il allait vraiment se retourner et lui parler, déjà prête à râler après lui. Un peu. Très peu. Juste... peut-être, parce que c'était lui qui avait commis une erreur à l'époque, elle, elle n'avait fait que réagir en conséquence, comme un battement d'aile qui provoque un tsunami... Parce que c'en avait été un, de tsunami, dévastant leurs vies à tous les deux, balayant les projets qui s'étaient effacés comme des mots écrits sur le sable fin que les vagues affamées viennent dévorer. Mais il finit par se retourner, l'affronter du regard, prétextant ne pas l'avoir reconnue. Mais quel menteur ! Comment aurait-elle pu y croire ? C'était le plus gros mensonge jamais soufflé aujourd'hui. Deux regards qui se croisent, se reconnaissent, et le sien qui s'évade jusqu'au sol pour ne plus le rencontrer. Mais c'est plus simple de faire semblant, n'est-ce pas ? De se dire qu'ils ne sont que des inconnus l'un pour l'autre. On change, en quinze ans. Elle, pas tant que ça. Du moins, de ce qu'elle croit. Lui, elle n'en sait rien, n'a jamais demandé. Et Jackson s'est toujours gardé de trop en dire sur lui, ou d'aborder de lui-même le sujet. C'est pour ça qu'elle l'a toujours aimé, cet ami précieux qui n'a pas insisté pour savoir, à l'époque. Qui s'est contenté d'être toujours là, quoiqu'il arrive.

Ami précieux. Alors que face à Dany, il y a le cœur qui tremble, frissonne, et qui s'agace. Elle laisse un sourire narguer ses lèvres, teinté de l'ombre de ce fameux sarcasme qui s'attarde un peu trop. « Toi aussi. T'as plus de rides. » Ce qui n'était pas faux. Mais il n'en était pas moins séduisant qu'autrefois. C'était un visage qu'elle aurait aimé embrasser ou dont elle aurait aimé sentir les baisers sur son derme. Le destin ne l'avait pas voulu. Ainsi, inspirant une gorgée d'air, elle ajoute « Alors comme ça tu es de retour à Edenton ? » avant de boire une larme de son café. Elle cultive cette conversation qui semble ne mener... à rien ? Elle se mordille la lèvre légèrement, par habitude, de celle qu'il connaît trop bien. A moins qu'il ait oublié depuis le temps ? Après tout, c'était à d'autres lèvres qu'il s'était égaré, la poussant à le quitter. « Tu comptes rester longtemps ? »

Bien sûr qu'il l'a reconnue. Même si ça fait quinze ans. Il arriverait à la reconnaitre si elle était de dos et avec un sac poubelle en guise de vêtement. Sauf qu'il ment, il sait pas vraiment pourquoi. Peut être parce qu'il n'a aucune idée de ce qu'il pourrait faire d'autre que les faux semblants. La confronter ? Il n'est pas sûr d'être prêt à entendre la vérité. Il ne veut rien savoir parce qu'il ne veut pas revivre l'affront imposé la dernière fois. Il a eu trop mal. Il a mit trop de temps à s'en remettre le con. Parce qu'Ava lui a brisé le cœur. Il voudrait pouvoir en parler et comprendre mais il ne peut pas. La seule chose qu'il désire à cet instant précis, c'est prendre ses jambes à son cou. hum, ça fait longtemps. qu'il lâche, monotone, comme pour justifier ces rides. Pas assez pour que les plaies soient refermés. Et les pansements sont bien fragiles. Et il ne peut s'empêcher d'la regarder. De laisser ses yeux couler sur son visage aux traits fins et délicats. je suis passé voir Emma. Une conversation qui ne pourrait pas être plus banale. Ils pourraient parler du vide qu'elle a causé dans son cœur mais au lieu de ça, ils échangent des futilités. Sa nuque qu'il gratte quand il essaye de concentrer son regard sur autre chose que son interlocutrice. Des enfants qui courent, des vieux qui s'embrassent, tout lui conviendrait mieux que de soutenir son regard à elle.

Et elle continu dans cette discussion sans queue ni tête Ava. Certes, il a débuté la supercherie mais elle aurait pu y mettre au terme rapidement au lieu de surenchérir dans les questions les plus inutiles qui soient. non, je n'vais... Sauf que lorsque son regard se pose de nouveau sur elle, elle se mordille la lèvre et il sent son cœur vriller. Les battements qui s'accélèrent vivement. Après tout ce temps, c'est dingue qu'elle parvienne encore à lui faire tant d'effet. Il passe une main dans ses cheveux et reprend : Ecoute j'crois qu'on a plus rien à s'dire alors on peut se contenter de sourire pour les photos du mariage et échanger quelques mots par politesse, pas b'soin d'aller plus loin. Parce qu'ils savent l'un comme l'autre qu'ils seront amenés à se recroiser. Ils ne vont pas se jouer une fausse scène à chaque fois n'est ce pas ? Faire semblant, ça va vite user.

@Daniel Porter

Ca fait longtemps, qu'il dit, pour justifier ses rides. C'est vrai. Ca fait longtemps. Tout comme la trace de sa bague de fiançailles qui avait fini par s'estomper trop rapidement, n'ayant finalement été portée que trop peu de temps. Sa main était vierge de la moindre alliance aujourd'hui. Et celle qu'elle avait autrement reçue de sa part, c'était son frère qui avait été chargé de la lui rendre, avec pour seul message ce : "elle ne viendra pas". C'était ce qu'elle s'était imaginé, n'avait jamais cherché à savoir ce qu'il s'était exactement passé. Elle avait filtré les appels. Mis son téléphone en silencieux, avant de finalement l'éteindre. Alors oui, cela faisait longtemps... mais l'adage disant qu'on n'oublie jamais son premier amour lui semble tellement vrai à cet instant. Il poursuit, explique qu'il est là pour Emma. Rien d'étonnant à ça.

Et puis alors qu'elle se mordille les lèvres, le questionne sur la durée de son séjour, il commence à lui répondre que non, il ne restera pas longtemps. Parce que c'était ce qu'elle devinait, le voir disparaître un jour ou l'autre, de la même manière qu'il était réapparu en ville, dans sa vie, à ce mariage qui allait les obliger à se retrouver, à passer du temps ensemble, forcément. Mais il ne va pas au bout de ses mots, à la place, c'est un autre discours qu'il lui tient, la laissant se raidir légèrement.

« Mais bien sûr... Regarde-toi, t'es même pas capable d'échanger quelques mots par politesse, Dany. Parce que tu vois, c'était ce qu'on faisait, là. J'étais polie. » qu'elle souffle, légèrement agacée, avant de tenter de croiser les bras en oubliant son café. Fatalement, le liquide brun se déverse en partie sur son haut, la laissant jurer un « Zut, mais c'est pas vrai. » Utilisant la serviette en papier accompagnant la tasse pour tenter d'éponger les dégâts. « Je suis pas certaine qu'on arrive à sourire sur les photos si on joue à ça. » qu'elle s'énerve, en s'écartant pour jeter sa tasse dans une poubelle à proximité. Parce que de son café, elle n'en a plus envie à présent.

Ils sont restés deux enfants. Et peut être que dans l'fond, elle avait pas complètement tort d'avoir peur. D'appréhender cette union. Ils étaient jeunes. Il avait fait sa demande un bretzel en guise de bague sans réfléchir. A l'époque, c'était une évidence pour lui, être avec elle et passer le restant de ses jours à ses côtés. Parce que s'il devait voir un seul visage au réveil jusqu'à sa mort, c'était le sien. Et les voilà, entre banalités et pseudo engueulades.  Ouais, ben peut être qu'on peut être polis sans avoir à s'parler. qu'il ajoute avant d'éclater de rire quand elle se renverse du café. Sauf que cet incident a pour effet de projeter son regard dans son décolleté. Ses mains deviennent soudainement moites. Il a désormais autant envie d'se barrer que de l'embrasser. Merde. Comment c'est possible ça. Comment elle peut avoir ce tel pouvoir sur lui alors qu'ils ne se sont plus vu depuis si longtemps. C'est vrai quoi, la page est tournée. Il la déteste. Point. Fin de l'histoire.

Il s'étaient pourtant tant promis. De toujours pouvoir compter l'un sur l'autre. De s'aimer éternellement. Et si les engueulades n'étaient pas rares à l'époque où ils étaient ensemble tous les deux, ils s'aimaient putain. Ils s'aimaient tellement. Elle n'a pas pu l'feindre ça. Elle devait le ressentir aussi. Parce que oui, il a été amené à se questionner sur ses véritables sentiments au fil des années sans elle. A essayer de comprendre pourquoi. Pourquoi elle l'avait lâcher sans même un mot à son égard. Il s'arrête alors de rire et la fixe une seconde, toujours le sourire aux lèvres. Quel gosse quand même. oh j'm'inquiète pas pour toi, tu sais faire semblant. qu'il lâche comme une bombe. Oui, parce que pour lui, si elle n'est pas venue alors qu'ils se juraient de s'aimer quelques jours plus tôt, c'est forcément qu'elle lui a menti et qu'elle a jouer un jeu.  Elle n'a absolument aucune idée de ce qui a pu se passer dans sa tête à l'époque mais c'était pas joli. Il s'était imaginé les retrouvailles dans sa tête si souvent mais ce scénario là n'était jamais ressorti. Et son cynisme, c'est elle qui en est totalement responsable ou en tout cas, c'est ce dont il essai de se convaincre. Parce qu'il est à milles lieux de savoir ce qu'il s'est réellement passé à l'époque.

@Daniel Porter

Elle n'a pas le temps de répliquer à son banal "être poli sans se parler". Parce qu'elle aurait pu lui dire qu'il serait bien le seul à qui elle n'adresserait pas la parole dans ce cas, et que cela se verrait comme le nez au milieu de la figure que les sourires seront aussi faux que celui d'un acteur au sourire colgate. Non, elle n'en a pas le temps, parce que son café se renverse sur elle et qu'il éclate de rire cet idiot. C'est un regard furieux qu'elle lève sur lui brièvement, alors qu'elle tente de sauver les murs en tapotant la tache de sa misérable serviette. Elle s'écarte, lâche qu'elle ne croit pas que ça fonctionnerait, et jette cette tasse qu'elle s'est retenue de lui jeter au visage. C'est une blessure qui la ronge, sa réaction de véritable gamin qui l'énerve, alors qu'elle continue de tamponner tout ça.

Forcément que ça n'allait pas bien tourner tout ça, peut-être qu'elle devrait dire à Jackson que c'était une mauvaise idée de la désigner comme témoin. Mais elle sait déjà ce qu'il lui répondrait, qu'il ne changerait pas d'avis, qu'il n'allait pas encourir les foudres d'Emma pour rien. Mais si elle avait déjà envie de le recouvrir de café... cela sentait vraiment mauvais. Elle plisse les yeux quand elle finit par entendre sa remarque, hissant ses prunelles sur les siennes, et ce sourire qui s'attarde à ses lèvres qu'elle a juste envie de lui arracher. « Je peux savoir ce que tu sous-entends ? Parce que de nous deux, c'est toi le meilleur acteur. » qu'elle souffle en laissant sa main retomber. Référence à cette trahison avec Caroline, que sa meilleure amie a au moins eu la gentillesse de lui avouer avant qu'elle ne s'engage dans un mariage qui certes la rendait nerveuse, mais dans lequel elle pensait être sincèrement aimée.

Puis elle s'avance de quelques pas, nouveaux sous-entendus si faux... « A moins que... oui, j'ai simulé parfois, pour ne pas blesser ta virilité. » Son regard qui s'attarde sur un endroit précis de son anatomie, pour le laisser comprendre ce qu'elle ose sous-entendre à son tour. « C'est ça que tu voulais entendre ? » dit-elle en croisant les bras sans se rendre compte que ça réhausse son décolleté imprégné de café. Mais ce n'est que pour le blesser. Parce qu'elle l'aimait qu'importe les secondes, que de simulation, il n'y en a eu aucune. Et qu'il lui a brisé le cœur… lui qui n'a été rien d'autre que sa première fois.

Ses sourcils se froncent quand elle lui dit que c'est lui qui a joué un jeu. Il sait pas Daniel. Il sait pas pour Caroline. Il n'a jamais été au courant d'cette histoire un peu tirée par les cheveux. Comme s'il allait en embrasser une autre. Elle devait clairement manquer de confiance en elle pour croire une seule seconde qu'il aurait pu faire un truc pareil. Si seulement elle l'avait appelé ce soir là pour régler l'affaire plutôt que de se terrer dans l'silence et ne pas se pointer. En même temps, il est pas mieux. Ca fait quinze ans qu'il fuit cette altercation de peur de ce qu'il pourrait entendre. Quinze ans qu'il est du coup coincé dans le passé. Incapable d'avancer. Oh mais j'ai jamais joué un rôle moi. Malheureusement. C'est d'ailleurs ce qui l'a tant brisé. Il était sincère. Il a laissé les murs s'abattent. Il lui a fait confiance en lui donnant les clés d'son cœur et elle a choisi de l'écraser d'la paume de la main au pire moment qui soit, devant une foule d'invité. Ah oui, parce que si avoir le coeur brisé ne suffisait pas, il aussi du gérer l'humiliation.

Il avance lui aussi. Ils sont à quelque centimètres l'un de l'autre seulement. Cette engueulade qui presque un goût de déjà vu. Sauf que dans l'passé, ils auraient fini par s'embrasser et se vautrer l'un contre l'autre. L'issue est bien différente ce soir : un adieu ? Véritable point final à cette histoire écourtée trop vite. Bien, au moins ça t'a évité d'faire la pire connerie de ta vie ! ET MOI AUSSI. qu'il lâche en vociférant comme un fou, les nerfs qui lâchent en l'agrippant par le bras. Ces autres qui se tournent finalement vers eux. Il la lâche d'un coup et recule d'un pas, conscient de n'être que l'ombre de lui même. Regarde c'que tu m'fais faire putain. Tu me rends complètement dingue. C'est une histoire d'amour qui devient presque fierté. A savoir qui fera le plus de mal à l'autre. Qui rendra les armes le premier. Putain, c'est pour ça qu'j'voulais pas t'voir. Ma vie se porte bien mieux depuis qu't'en fais plus parti ! qu'il dit plus calmement. Encore des foutaises, il ne le pense pas une seconde puisqu'il n'a jamais été aussi heureux qu'à l'époque où il était avec elle.

@Daniel Porter

Elle hausse les yeux au ciel quand il affirme n'avoir jamais joué de rôle. Parce qu'à ses yeux, il en a bel et bien joué un. Celui du fiancé trop parfait pour être vrai, engagé dans une histoire passionnée et qui disait l'aimer... mais qui a embrassé sa meilleure amie dès qu'elle a eu le dos tourné. A l'époque, elle n'a pas voulu de détails, ni les raisons, ni les circonstances. C'est venu après, quand ça lui aurait fait plus de mal que de bien, alors elle ne les a jamais posé, ces maudites questions. Elle est restée dans le flou. Elle ne sait ni pourquoi, ni comment... ça a pu se produire. Juste qu'il l'a fait. Au fond, ce n'était qu'un baiser, un simple baiser. Mais ça voulait dire tellement aux yeux d'Ava, bien trop alors qu'elle paniquait déjà.

Alors elle s'avance, tandis qu'il fait de même, que la distance entre eux n'existe presque plus. Souvenir d'un autrefois qui semble bien trop vivace, qui se languit de l'union de lèvres qui ne se produira sûrement plus. C'est la blessure de la femme bafouée qui parle, celle de la femme blessée qui hurle, à travers ces mots qu'elle lui destine, de toute cette attitude, alors qu'elle remet en cause sa virilité. Elle aurait presque pu s'excuser... presque... s'il ne l'avait pas attrapée par le bras en lui criant dessus. Elle sait que tout le monde les regarde, ces gens qui majoritairement la connaissent.  « Lâche-... » Elle n'a pas le temps de finir qu'il a déjà cessé de l'agripper. Geste initié avant même qu'elle n'ouvre les lèvres, sans doute sous tous ces regards qui les scrutent. La ville n'est pas si grande. Et il n'y a que 3 vétérinaires, alors le tour est vite fait. Tous ceux qui ont un animal ont un jour ou l'autre croisé sa route. Et puis... certains se souviennent peut-être.

Mais lorsqu'il affirme que sa vie est bien mieux depuis qu'elle n'en fait pas parti, sa main se lève et percute sa joue, tandis qu'elle lui crache au visage « La mienne aussi ! Et comme ça t'as pu te taper toutes les poufs que tu voulais. » C'est la blessure d'autrefois qui parle. La douleur. Et peut-être... Il était son grand amour, et il a tout gâché. Mais elle recule en réalisant ce qu'elle vient de faire, cette gifle qu'elle aurait du lui donner autrefois et qui n'a pas vraiment de sens aujourd'hui. « Je... je suis désolée... » qu'elle souffle, avant de pivoter sur elle-même, le laissant derrière elle, quittant cet endroit, et lui. Peut-être qu'il avait raison, ils n'auraient pas du se croiser, parler, ou...

Qu'importe, il fallait juste qu'elle parte. Et elle le fit.