Caresse de l’aube. Cela faisait quelques semaines qu’il avait posé ses valises dans sa maison d’enfance pour ses perms. Pourtant, chaque nuit, il ressentait ce même supplice. Suffocant. De l’air. C’est tout ce dont il avait besoin. Enfermé entre les murs de cette maison, cette familière sensation prenait vicieusement place. Celle qui précède une crise d’angoisse. Aussi, le blond s’était rapidement vêtue pour aller courir. Fuir. Il fallait qu’il s’éloigne des souvenirs. Ceux qui montraient des images d’un Jared vivant. Cette merde en regorge. La porte définitivement close de l’ancienne chambre de son aîné, lui faisait face. Le narguant insidieusement. Ombre qui foule le sol. Doucement, l’aube avait laissée place à un pâle soleil, tandis que ses pas l’avaient menés à un café. Arôme enivrante. Mettant fin a sa fuite, Dev’ finissait par pousser la porte.

Comme un mardi matin habituel. Mon premier patient m'attendait pour 10h15, un soin de pansement et surtout un soutien psychologique. Comment des êtres humains pourvus d'un coeur -pourtant-, pouvaient-ils laisser leur père, grand-père ou encore oncle, tout seul? Je ne comprendrais jamais la race humaine sur beaucoup de points, c'est bien dommage. J'avais une heure à tuer devant moi et après avoir pris une bonne douche, je m'empressais d'aller au café le plus près de mon hôtel -où je résidais pour l'heure-, m'avançant vers le comptoir, commandant un café noisette et un croissant. Je fus servis et au moment d'ouvrir mon porte-feuille, un malaise m'ennivra. Et merde.. chuchotais-je. Tapotant rapidement mes poches de jeans avant et arrière et les poches de mon gilet, fallait que j'me rende à l'évidence, ma carte bleue devant traîner dans mon bordel.. Adieu le café du matin.

Regard dans le vague. De sa poche, il sortait son gsm pour jeter un coup d’œil à ses messages. C’est à ce moment-là qu’il l’entendait. Familière. Cette voix. Elle lui disait vaguement quelque chose. En mémoire, une ébauche de souvenir venait s’éveiller, mais avant qu’il puisse se laisser pleinement envahir par celui-ci, les mots de la brune lui parvenaient. «  C’pour moi. » Se rapprochant, Dev’ en profitait pour commander un latte, avant de payer.

J'étais du genre bordélique, même si ça paraissait contradictoire avec ma profession, c'était le bordel aussi bien dans ma tête que dans ma chambre d'hôtel, surtout en ce moment.. J'avais du sortir ma carte bleue pour faire des achats via le net hier soir et.. je l'avais pas. Puis avec toute la chance que j'avais, j'avais pas non plus de pièces pour le donner au serveur. J'allais tourner les talons quand ta voix résonnait dans ma tête. "Je.." un inconnu qui m'paye mon café? Le serveur remerciait et je me trouvais juste hyper bête là. ..merci? je suppose qu'il fallait que je te remercie. Mais oui! Tu étais le garçon au cimetière... ça remontait. On s'est déjà croisés non? demandais-je même si j'avais déjà la réponse. Je m'asseyais au tabouret de bar pour attaquer mon croissant.

« Y m’semble. » Le fantôme du cimetière. Dénomination non glorieuse, mais c’est le nom qu’il avait finit par lui donner. Ensemble, ils avaient partagés des choses plutôt intimes. Des choses que le blond n’aurait jamais confié, car trop méfiant. « Au cimetière. » curieuses apposées sur sa silhouette. Sur elle, ses billes arpentaient son visage avec une curiosité renouvelées. « Tu vis ici maintenant ? »

Il me semblait aussi t'avoir déjà vu mais maintenant j'en étais persuadée. C'était au cimetière Oui, c'est exact.. je souriais légèrement derrière ma tasse de café. En plein jour, j'avais en face de moi un tout autre visage. Ce soir là on était resté peut-être des heures à parler, se livrer l'un à l'autre, comme si nous n'allions jamais nous revoir.. et bim, t'étais ici. Oui, depuis trois ans.. et toi aussi je suppose? je terminais mon croissant en écoutant ta réponse. Lola, et toi.. Hardin..? ça y ressemblait bien.

«  Toujours. » A ses lèvres, le blond portait son gobelet pour laisser la chaleur imprégner sa gorge. Gênant. S’il y avait bien une chose à laquelle il ne s’était pas attendue, c’était la revoir. Durant cette fameuse nuit, ils avaient échangés bien plus que des banalités. Des choses intimes. Il lui avait dit à quel point, il était perdu depuis le décès de son frère. Que tout ses souvenirs, étaient remplacés par la vision du corps sans vie de Jared. Puis, un peu plus profondément, il lui avait dit que ça aurait du être lui. Le benjamin. Parce que de lui, on n’attendait pas forcément grand chose et qu’a l’inverse, la joie familiale dépendait de Jared. Mais la vérité, c’est qu’il n’était pas dans le groupe d’intervention. La vérité, c’est qu’il avait été épargné d’une vision bien plus sordide. Du dernier souffle. C’était Wade qui avait vécu ça et au lieu de compatir, Devyn le détestait. Opale azur. Tout en prenant une gorgée, il observait la jeune femme terminé en vitesse son déjeuner. Il y avait quelque chose chez elle d’apaisant. Légère symphonie à travers ses lèvres. Le blond laissait échapper un rire en écoutant la réflexion de Lola. « Hardin hein. » Peu fier, il avait regardé ce film en compagnie de sa meilleure amie. Pupilles malicieuses. «  Devyn. » Soudaine impulsion. « T’fais quoi la maintenant ? »

C'était pas tous les jours que j'me faisais offrir mon café, et c'était quand même agréable. Bon, j'avais juste eu la tête ailleurs ce matin donc je pouvais pas être forcément fière de moi, tu avais eu juste de la pitié pour moi certainement. Je terminais ma boisson chaude et je regardais l'heure sur ma montre, j'avais encore 45 minutes devant moi.

Je pouffa de rire à ton sourire au sujet du prénom Hardin.. Oui j'ai lu et vu after... J'avoue j'suis pas parfaite ! je haussais les mains, sorry!

J'étais censé aller travailler mais j'avais encore un peu de temps J'ai une grosse demie heure devant moi à rien faire.. Et toi ? tu travaillais ?

 « J’ai rien dis » répondait-il en levant une main, tandis qu’un sourire venait prendre naissance sur ses lèvres. « A ton avis, si j’te demande. » Éclat malicieux dans ses opales cristallines.  « Ça t’dis d’faire un tour ? » Dis à voix haute, ça paraissait presque être ridicule. Pourtant, il se laissait guider par le hasard. Étrangement, lui parler avait suffit à couper court à cette sensation angoissante. Alors, peu importait combien de temps cela allait durer, Dev’ comptait bien en profiter.

Les histoires comme celle d'After ça arrive que dans les livres ou films, donc autant en profiter pour rêver un peu hein. Pourtant j'étais pas du genre à chercher l'amour mais tout d'même, je restais humaine, et une femme qui plus est. Pourquoi pas. avec plaisir même, dans mes souvenirs t'étais de bonne compagnie, et puis à une heure aussi matinale, c'était une première. Je remerciais le serveur, pour te suivre en direction de la sortie, sentait l'air froid me frapper le visage. La chaleur des Hamptons me manque vraiment parfois.. riais-je nerveusement. On va où?

La dernière gorgée de son café emplissait sa trachée. Patiemment, il attendait que Lola lui donne une réponse. Elle va accepter. Il pouvait le voir. Doute fugace sur son ovale. Celui-ci finissait par s’ouvrir. Pourquoi pas. Les mots de la brune emplissaient l’espace entre leur deux être. « Ok. » Rompant le contact, le serveur venait les débarrasser, avant qu’enfin, ils quittent l’espace chaleureux. Brouillard matinal. L’éclat glacée du soleil, était accompagné d’une chape de brouillard. Atmosphere particulière. S’en était presque apaisant. Symphonie cristalline. Le son mélodieux de son rire, lui arrachait un discret sourire. « Pourquoi l’avoir quitté alors ? » Les mains dans les poches de son sweat de sport, il reprenait : « Là où nos pas nous portent. » La malice dans le regard, Dev’ tournait son visage vers elle.

A l'extérieur, on ressentait le froid de l'hiver qui s'installait de plus en plus, et pourtant je me sentais plutôt bien à parler et marcher à tes côtés. J'ai choisi de construire ma vie ailleurs.. Et de garder la maison familiale pour me ressourcer.. il y avait beaucoup de souvenirs de mes parents là bas. puis pour bronzer et chiler entre autre ! faire ma starlette sur la plage.

Nous arrivions au niveau du port. C'était tellement beau le paysage. C'est plutôt pas mal ici, quand même.. je t'offrais un regard et un sourire pour accompagner ce dernier. Tu fais quoi ici, toi ? comme métier, passe temps ou même études ?

« J’comprends. » N’était-ce pas une chance, de pouvoir refaire sa vie ailleurs et d’avoir le courage de tout quitter définitivement ? Même, s’il passait sa vie entre l’armée et les voyages, Devyn savais pertinemment qu’il finirait sa vie ici. C’était comme si, en naissant dans cette ville, il avait signé un pacte. Quoi qu’il fasse, tout finissait par le ramener à Edenton. Avançant à une vitesse régulière, les deux protagonistes arrivaient au port. Mots portés par l’air marin. «  Pas mal » Un léger rictus amusé s’emparait de ses lèvres. « J’suis dans l’armée de terre. J’ai profité de quelques perms pour revenir. Et toi ? »

Rester à Long Island c'était bien pour le soleil, la farniente quoi.. mais pour mon bien-être au fond, il avait fallu que je reparte à zéro en quelques sortes. Trop de souvenirs, tue le souvenir..

Puis ici on était bien, j'y avais posé mes valises il y a trois ans et j'avais quelques cousins en ville donc ça me permettait aussi d'avoir quelques repères. Je sortais beaucoup aussi, donc ça pouvait que bien aller. Ah oui, tu m'avais dis que t'étais militaire.. je hochais la tête, me souvenant de ce détail. J'avais tellement de préjugé sur ce métier et en particulier sur un détail.. T'as des mains.. vraiment propres pour un militaire. ok, j'riais bêtement. Je regardais peut-etre trop de reportages sur les mecs dans la terre etc. Je suis infirmière et j'ai décidé de faire du domicile en arrivant ici.. puis je fais pas mal de bénévolat pour des assocs qui aident les enfants malades surtout.. les sdf.. enfin je m'occupe!

Le regard sur l'horizon, je le ramenais sur ton visage en te détaillant un peu mieux. Franchement bel homme.