Ce n’était vraiment pas sa journée du tout. Commencer avec un client VIP qui pique une crise parce qu’il ne comprend pas ses propres finances, se faire blâmer pour les investissements, perdre le dossier en cours de chemin, la bataille pour le retrouver avant que le client ne franchisse la porte. C’était vraiment une belle façon de débuter sa journée, encore moins avec tous les problèmes survenus en après-midi. Certaines personnes dans cette banque ne méritait pas leur emplois, et Lily ne s’est pas gênée de leur dire en pleine face. Comme si elle allait accepter un travail médiocre, ils devaient faire un peu plus d’efforts. C’est donc avec une humeur d’enfer qu’elle quitte la banque à la fin de sa journée, à 17 heures exactement comme toujours. Ce n’est qu’une fois dans sa voiture que Lily réalise que ce n’était pas une bonne idée de retourner à la maison ainsi. Elle risquerait de s’en prendre à son petit frère pour aucune raison, et ce n’était pas bien.

Elle se met donc en route vers le Governor’s Pub, rien que l’idée de manger des ailes de poulet lui donnait déjà l’eau à la bouche. Elle jette un regard vers l’heure alors qu’elle passe par un détour devant l’hôpital, c’est là qu’elle le voit. Du coin de l’oeil, posé tranquillement contre le mur de la bâtisse, son cellulaire en main. Ah ouais, il est vivant alors? Freine brusquement lorsqu’elle réalise qu’il y avait un piéton qui a décidé de passer devant elle. Elle grogne de frustration en le dévisageant avant de reporter son regard sur lui, et après un moment d’hésitation elle décide de faire demi-tour pour entrer dans le stationnement de l’hôpital, se garant directement devant l’homme. Ceinture qu’elle détache avant de débarquer. “Alors, je commençais à croire que tu n’étais que le fruit de mon imagination.” Elle lâche en le fixant. Sourire aux lèvres alors que ses yeux le détaillent de haut en bas. “Mais je vois que tu es bel et bien réel.” Elle croise ses bras tout en penchant sa tête sur le côté. “Tu m’évitais?”

@Vittore Muccino

L’hôpital d’Edenton est certes plus petit, moins sophistiqué que celui dans lequel tu travaillais à San Francisco, il n’empêche que tu t’y sens beaucoup mieux. Tu ne regrettes pas ta décision de rejoindre l’équipe médicale, puis tu t’es dit que rester dans ce petit bled permettrait à Lauren de grandir sereinement. L’ambiance communautaire de ce village lui offrirait beaucoup plus d’assurance, de soutien et toutes ces choses heureuses que n’offrent pas les grandes villes. Du coup, tu comptes y rester pendant un moment jusqu’à ce que la petite te dise qu’elle veut découvrir autre chose ou alors que tu trouves quelque chose de mieux. Ou pire, que tu sois obligé de reprendre les rênes des Vignobles Muccino… L’idée ne te plaît pas du tout, mais tu ne peux pas omettre le fait que tu sois l’un des membres du conseil d’administration, l’un des potentiels PDG si ton frère décide à quitter ses fonctions. Tu préfères ton travail de médecin… Pouvoir sauver des vies etc. Il y a tout un panel de choses que tu affectionnes dans ton métier donc ça serait un désastre si tu devais un jour arrêter. Parmi les choses que tu aimes dans le métier, c’est l’imprévu qui prime le plus. Tu n’aimes guère les choses linéaires ou la routine en général alors qu’à l’hôpital, tu peux passer d’une journée très calme à un rush total suite à un accident ou autre. Ce qui était le cas de ta journée d’aujourd’hui !

Tu n’as guère vu le temps passé et ce n’est qu’à l’arrivée de ta collègue que tu peux enfin souffler. Tu lui passes rapidement les consignes, puis tu lui fais un petit topo de la journée avant de ranger tes affaires et de te diriger vers la sortie de l’hôpital. Avant même que tu ne puisses arriver à ta voiture, tu es interrompu par un appel et tu le prends immédiatement parce qu’il s’agit de ta petite sœur. Il est bien rare que ta famille t’appelle donc tu te dis que c’est assez urgent. Mais au final, elle t’appelait uniquement pour prendre de tes nouvelles et ça t’énerve un peu. Néanmoins tu ne l’envoies pas sur les roses, tu te contentes de répondre calmement à ses questions. Puis soudain un voix te tire hors de ta conversation téléphonique et en posant tes yeux perçants sur la personne qui venait de te déranger, tu restes comme pétrifié en la reconnaissant. « Je te rappelle plus tard ! » dis-tu à ta sœur en italien avant de reporter ton attention sur Lillian, la jolie asiatique que tu fréquentais il y a quelques temps de cela même si malheureusement, vous n’aviez guère pu aller plus loin. « J’ignorais que tu étais de retour dans le coin. » admets-tu avec un sourire énigmatique avant de retirer tes lunettes que tu rangers dans la poche de ta blouse blanche. « J’étais surtout débordé. ». Un léger mensonge étant donné les raisons pour lesquelles tu ne voyais plus la jeune femme.

Il a la réplique vite, mais elle ne fait que rire brièvement tout en roulant des yeux. L'excuse du siècle, mais elle ne peut contredire parce qu'il avait évidemment un métier qui demandait beaucoup de son temps. Dur d'en vouloir à un médecin d'être débordé, surtout à un médecin qui travaille à l'hôpital. "Il y a vingt-quatre heures dans une journée." Elle finit par rétorquer avec une petite moue sur le visage. Elle était déçue et légèrement vexée de ne pas avoir été assez marquante dans leur courte fréquentation pour qu'il pense à lui écrire ne serait-ce qu'une fois, un seul message. Elle qui peine à trouver une personne avec qui elle pourrait se voir avec, les gens de son âge étaient trop immatures et les gens plus âgés apparemment disparaissaient du jour au lendemain sans lui donner de nouvelles. Peut-être que c'était un signe pour qu'elle aille fouiller dans les candidats un peu plus jeunes? L'image de son frère lui pop à la tête et elle décide que non, ça serait trop étrange de sortir avec quelqu'un qui pourrait être amis avec son petit frère. "Et là, tu es débordé?" Elle demande en prenant quelques pas vers lui. Difficile de ne pas s'approcher de lui, un bel homme qui la dépassait de plus de trente centimètres, les muscles qui débordaient presque de sa blouse. Ce blanc qui contraste avec sa peau. Lily avait presque l'eau à la bouche rien qu'à le regarder. "Tu m'as promis un souper la dernière fois qu'on s'est vu, tu te rappelles?" Un sourire s'installe sur ses lèvres alors qu'elle lui sert un visage innocent. "Et ça tombe bien, j'ai faim en ce moment même."