C'était une mauvaise idée d'y aller d'une traite et de faire le retour sans prendre la peine de remettre un peu de carburant, tu voulais que les choses se fassent vite, l'idée même de ce déplacement pour les affaires te faisait soupirer longuement. Quand sur le chemin pour regagner tes pénates la jauge d'essence s'est allumée, tu t'es dis que tu pourrais le faire, rouler sur la réserve ne te dérangeait pas, ton téléphone n'avait de cesse de vibrer jusqu'à ce que les routes empruntées te fassent comprendre que tu touchais au but, la maison n'était plus si loin. De la paume de ta main tu tapotait le volant, comme pour encourager ton bolide sombre, un peu à la manière d'un équidé en pleine course, sauf que la tienne prit fin soudainement. Le véhicule se mit à brouter sur quelques miles avant que le moteur ne cesse de ronronner et que tu ne te gare sur le bas côté avant de descendre en claquant rageusement la portière. "Fais chier," as-tu soupiré en glissant une main dans tes cheveux, balayes du regard ce qui t'entoure, des champs, des arbres et au loin, la civilisation. Tout en te mordant les lèvres tu plongea le haut de ton corps dans l'habitacle afin d'en tirer ton téléphone portable et tu verrouille ta caisse en un couinement caractéristique avant de t'approcher vers les glaneurs voûtés dans un champs à quelques centaine de mètres de toi. Naturellement, sur le chemin tu te rends compte qu'ici le réseau est inaccessible, dans un long tchip tu glisse ton smartphone dans la poche arrière de ton jean et t'élance vers la populace. "Excusez-moi, bonjour !" articules-tu, mais tout en progressant dans leur direction tu te rends compte qu'ils sont vêtus d'une drôle de manière et ce n'est pas sans te rappeler l'époque de Charles Ingalls que tu ne te sens pas capable de dater. "Je suis tombé en panne d'essence," dis-tu en ralentissant le pas, étrange sensation dans les entrailles parce que ce que tu vis ressemble à un scénario de mauvais film d'horreur.
Comme tous les mardi, Jonas avait rejoint son père dans les champs aux aurores. Ils avaient cultivé la terre et enlevaient les mauvaises herbes. Les pommes de terre avaient déjà bien poussé et cet hiver ils auraient au moins de quoi manger dans les assiettes. Il avait faim et l’heure du déjeuner avait presque sonné. Son ventre gargouilla tandis qu’il attrapa son outil qu’il déposa au-dessus de la récolte avant le départ vers la maison. Bras chargés de la brouette et d’un bon kilo de patates, Jonas se dirigea vers la charrette pour commencer à ranger les caisses de provision. Il était alors caché par le véhicule en bois quand soudain une voix l’interrompit dans sa tâche. Son père et lui-même levèrent la tête vers l’homme qui s’avançait vers eux. Sa plus petite sœur ainsi que son petit frère levèrent eux aussi le nez vers l’inconnu. Bonjour répondit le patriarche en redressant son chapeau de paille sur ses cheveux grisonnants. Jonas observa caché derrière la charrette, terminant de ranger ce qu’on lui avait donné. Le père Klopfenstein ne répondit pas non plus au problème qu’exposait l’homme en face d’eux. Jonas fit l’aller retour oculaire entre l’inconnu puis son père. Comment pouvons-nous vous aider, monsieur ? Demanda le paternel. Il était tout naturel que le père Klopfenstein lui propose son aide car c’était commandé ainsi par le Seigneur. Mon fils peut vous mener jusqu’à notre ferme, si cela peut vous avancer. Jonas fit quelques pas et pu enfin être visible par l’homme, hocha la tête, les yeux rivés sur son père avant de les détourner vers l’inconnu. Il était habillé d’une simple chemise, bretelles et pantalon droit et noir, les mains pleines de terre. Il allait justement rentrer pour déposer notre récolte, monsieur. Jonas hocha de nouveau la tête et fit signe à sa petite sœur et à son petit frère de rentrer dans la charrette. Ils se mirent à courir et grimpèrent agilement à l’arrière du véhicule en bois.
Aucun réseau sur ces terres et pourtant, tu sais très bien qu'à quelques miles de là, tu n'as aucun soucis pour entrer en contact avec la civilisation, étrange. Tu es comme renvoyé à l'époque des pionniers, sentiment d'être coincé dans une série télévisée et t'attends à croiser docteur Quinn derrière une de ces bâtisses que tu vois au loin, peut-être même que les natifs américains sont sur le point de vous attaquer à cheval. Mais le vieil Abraham Lincoln te tire de tes pensées, tu t'en veux presque d'ailleurs, de le comparer à celui qui fut l'un des présidents des états unis d'Amérique, pauvre gentilhomme que tu ne connais pas. Lentement tu hoches la tête, ce dont tu as besoin ? De l'essence, ou au mieux un téléphone pour appeler une dépanneuse, parce que ta boîte automatique ne te permettra pas de déplacer ta caisse. "Merci," tu dis simplement en lui adressant un sourire poli avant de prendre la suite du grand blond qui semble être son fils, tu te sens maladroit et adresse un drôle de regard au fils aîné quand vient le moment de venir le rejoindre sur le banc de la charrette, réalise alors que tu n'as jamais fais de balade en calèche à patates, te serais senti certainement plus à l'aise sur le dos d'un de ces bourrins, mais bref. Prends place. "Moi c'est Axel," tu lances alors en te raclant la gorge, jetant un rapide coup d’œil aux deux petits monstres à l'arrière avant de faire dévier ton regard de jade sur Albert Ingalls. Tu as bien envie de leur demander de quelle secte ils sont issus, mais tu t'en voudrais de paraître impoli alors que ces gens-là ont accepté de te venir en aide. "Je suis tombé en panne d'essence un peu plus haut," là tu balances ton pouce par dessus ton épaule avant de tirer de ta poche ton paquet de clopes et ton zippo argenté que tu fait claquer après t'en être servit. "Vous avez quand même de drôles de vêtements." te permets-tu de leur faire remarquer à tous en recrachant la fumée par tes narines, cancéreuse calée entre ton majeur et ton index.
D’un pied ferme et les mains sur une planche de la charrette, le blond se hissa sur le véhicule et s’installa sur le banc avant de prendre les rênes de cuir en main. Il attendit que les gosses soient correctement installés derrière ainsi que l’homme à sa droite avant de donner un petit coup et de faire avancer les chevaux. Il tourna rapidement la tête sur le côté alors que l’homme donnait son nom. Axel. Hochement de tête, il étira un petit sourire. Jonas. Et derrière c’est Elijah et Bethany. Les deux enfants saluèrent l’homme en secouant vivement leurs mains noires de terre. La petite fille, ajusta les plis de sa robe avant de mettre les mains sur les cuisses et d’observer le paysage tandis que le petit garçon, lui, ajustait son chapeau de paille et comptait les pommes de terre dans les caisses. Il continua de faire trotter les chevaux sur la route tandis que l’homme reprenait. Oh je vois. Il ne voyait pas du tout. Bien qu’il connaisse l'existence des voitures, leur maniement et leur fonctionnement restaient un mystère. Il détourna le regard vers la route et ne s’offusqua pas qu’il puisse fumer alors qu’il se tenait près d’eux. Evidemment avec son père ça ne se serait pas passé aussi simplement. Vous aussi, monsieur vous avez de drôle d’habits. Cela dépend du point de vue, je suppose. Haussement d’épaules alors qu’il donnait un autre petit coup sur les rênes avant de tirer sur la gauche pour faire tourner les chevaux sur le chemin vers la ferme. Petite route faite simplement de terre, la charrette se secoua doucement au rythme des trous et des pierres qu’ils trouvèrent sur le trajet. Une fois arrivé, Jonas sauta et ajouta : Mère ?! Les caisses sont là. Je vais aider le monsieur pour qu’il puisse appeler pour sa voiture. Une femme de certain âge sortit et s’avança sur le perron. Elle était habillée d’une robe bleu foncé et d’une coiffe blanche alors qu’elle essuyait une assiette. Madame Klopfenstein hocha la tête sans quitter des yeux l’homme inconnu sur ses terres. Yeux méfiants sur lui, elle ne le quitta pas une seule seconde, se disant, sans doute, qu’un inconnu païen dans les parages n’allaient probablement rien apporter de bon en ces lieux. Jonas fit le tour de la charrette et désigna la route au loin. Je vais vous amener au téléphone. Puis il se mit en marche.
La route de terre battue sur laquelle vous avez progressé avec la charrette t'a littéralement battu les couilles et tu t'es abstenu de dire quoi que ce soit, ça aurait sans doute été malvenu de ta part dans ce tableau où tu dénotes tellement, tu t'es demandé comment faisait le fameux Jonas pour ne pas grimacer à chaque bosse ou pierre sur lesquels les roues de la carriole passait. Il te mène jusqu'à un corps de ferme où il finit par descendre et tu l'imite, adressant un regard en biais à la Caroline Ingalls qui sort de chez elle, une assiette à la main et à qui tu adresses un mouvement de menton poli en guise de salutation. Peut-être est-ce ainsi que ta vie va prendre fin, te faire kidnapper par une secte de fermiers perdus à quelques miles de là où tu as toujours grandit, manqueras-tu seulement à quelqu'un ?? Le mystère reste entier alors que tu prends la suite du grand blond. "Vous ?" tu répète en recrachant une mince fumée blanche, sourire aux lèvres, il ne te semble pas plus jeune que toi, avec sa barbe entretenue tu dirais même qu'il est plus âgé et le vouvoiement, en dehors des mondanité, tu n'en n'es pas fan. "Le téléphone, il est... Où se trouve t-il exactement ?" tu demandes alors, un peu inquiet qu'il ne t'emmène dans un coin sombre pour mieux te découper en petits bouts avant de dévorer ta chair. Non, au 21 ième siècle il est inconcevable que des gens n'aient pas le téléphone chez eux, et pourtant tu vas être surpris. T'as jamais autant marché depuis que tu as appris à le faire en fait, ça te semble interminable cette route, tu commences déjà à cracher tes poumons alors qu'en une pichenette tu te débarrasse de ton mégot de cigarette. "Ta tête me dit quelque chose, on s'est déjà vu, non ?" son silence te pousse à parler et ça te surprends, tu n'es pas d'un naturel très bavard et habituellement tu te contentes simplement d'observer ce qui t'entoure sans prendre part à la fête.
A peine fut-il en chemin que la question d’Axel tomba. Le vouvoiement ne semblait donc pas approprié avec cet homme et pourtant Jonas ne put s’empêcher de recommencer. Oui, vous. Il continua la route, à la hauteur du grand brun qui recrachait régulièrement de la fumée comme les vieux trains qu’il avait pu voir alors qu’il était encore scolarisé. Mains dans les poches, ils s'avançaient vers la bifurcation avant de reprendre la petite route qui allait les mener à la cabane. Levant son bras, le grand blond désigna l’autre côté du terrain où on pouvait déjà voir un petit cabanon en bois assez grand pour une seule personne. C’était là bas qu’il y avait la seule ligne téléphonique pour les quelques familles présentes en dehors d’Edenton. Il est là bas, dans le petit abri. Le téléphone était loin d'eux, c'était seulement pour les urgences, les problèmes liées à la santé ou pour diverses raisons que seuls les patriarches pouvaient autoriser ou non. Il tourna la tête vers lui, retirant son chapeau de paille pour passer sa main dans ses cheveux blonds avant de le remettre sur le haut de son crâne. Vous n’en avez pas avec vous ? Il parlait d’un téléphone. Il me semblait que tout le monde en ville avait un téléphone sur lui. C’était peut-être étrange pour les autres mais pour Jonas ça n’aurait pas été étonnant que le fameux Axel n’ait pas cet engin du diable. Alors qu’ils continuaient leur chemin, Jonas s’arrêta lorsque l’homme avait balancé d’une pichenette son mégot de cigarette. Il se dirigea vers le déchet, l’écrasa sous ton talon et dans la terre puis ramassa le mégot, qu’il garda dans la main. On ne jette pas ses déchets ici, s’il vous plaît. Il étira tout de même un sourire légèrement pincé puis reprit sa route, en revenant à sa hauteur. C’était quand même un lieu de culture, un endroit sain où poussaient des plantes et des herbes, il ne fallait pas que ce soit pollué par un mégot ou quelconques salissures de la ville. Ça, Jonas y tenait fortement et son père aussi. Il tourna la tête vers lui et haussa les sourcils. Et bien, je vais régulièrement en ville pour les provisions. C’est peut-être là que vous m’avez vu, monsieur. A mi-chemin, Jonas demanda : Et vous travaillez ? Vous travaillez dans quoi ? Ils marchèrent au bord de la route, évitant ainsi qu’une voiture ne les frôle. Axel avait l’air sympathique bien qu’il faisait tâche dans le paysage avec ses vêtements même pas repassés. Oui, une pointe de jugement et Jonas ne manquerait pas de prier le soir même pour ce comportement loin de la sagesse de sa communauté qu’on lui avait enseigné.
Il est là bas, dans le petit abri. léger froncement de sourcils quand tu repère la cabane de bois au loin, te demande s'il te ne prends pas pour un con, parce que des comme ça t'en as vu passé et un tas, quand, dans ton enfance tes parents t'envoyaient en vacances dans la campagne anglaise et que tu te retrouvais à devoir aller poser une royale pêche dans une cabane du même genre, mais vu l'ambiance, tu te dis qu'il doit être sérieux, pour le moins, tu t'abstiens de relever quoi que ce soit. "Dis Jonas, on peut se tuto..." se tutoyer, sauf que tu déglutis bruyamment quand il se penche, t'offre un sourire pincé et te fait remarquer qu'ici c'est pas la fête, qu'on ne jette pas ses déchets n'importe où. Là tu te sens con, glisse une main sur ta nuque et reprends ta route en laissant flotter un drôle de silence avant de te reprendre. "Si, mais mon blackberry..." ouais, mec t'as pas voulu entrer dans le siècle actuel avec les iphones et toutes ces merdes parce que t'aimais trop les touches de ce téléphone. "'Fin, je n'ai pas de réseau ici, donc, mise à part écouter de la musique et faire de la lumière, il ne me sert à rien," là tu lâche un rire de gêne, ça t'échappe, sans doute est-ce dû à tes nerfs, dieu seul sait. "Je..." comment décrire ton parcours ? Lui balancer à la gueule que t'a bossé dans l'industrie du porno pour finalement reprendre la radio de tonton ? Nouveau rire qui s'apparente d'avantage à un raclement de gorge. "J'ai longtemps monté des films, puis j'ai racheté des parts d'une société de la même branche et depuis 5 ans je possède la station de radio d'Edenton, la ville d'à côté." tu précise en lui adressant un sourire mal assuré avant d'hausser les épaules. "Tu travailles uniquement sur vos terres, enfin, tout ça c'est à toi ?" coup de menton en direction de la lande qui s'offre à vous, sait on jamais peut-être qu'au décès de son père il héritera.
Le trajet, Jonas le connaissait ce chemin, pour avoir suivit son père plusieurs fois (sept à tout casser) jusqu’à la cabine alors qu’il avait dû appeler le médecin pour les derniers accouchements de sa mère ou bien pour une jument qui avait eu des soucis pour mettre à bas. Le mégot avait coupé court à la conversation et Jonas n’avait pas souhaité relancer cette phrase perdu dans le néant. Non. S’il voulait reprendre alors qu’il n’avait qu’à le faire après tout. Jonas continua le chemin, mains dans les poches. Vous voulez dire votre “Berry Black” ? Il haussa les sourcils se disant que peut-être il avait mal formulé sa phrase. Puis en quoi une mûre pouvait aider à téléphoner ? Tout ça n’avait aucun sens selon le jeune Amish. Il l’écouta pourtant attentivement lui parler du réseau, de la lumière et de la musique mais hormis des mots ici et là ça ne semblait pas plus clair. Je ne comprends pas, finit-il par répondre tout en secouant la tête. Puis il préféra s'intéresser à son travail parce que ça au moins il l’avait en commun, non ? Tous deux avaient un boulot et devaient se lever aux aurores. Oh la radio. Ça il connaissait, du moins pour l’avoir entendu dans le supermarché ou bien dans les voitures quand les vitres étaient ouvertes. Il hocha la tête. Je connais, oui. J’entends parfois la radio dans la rue ou à l’épicerie. C’est vous qui parlez ? Le cinéma, ça lui échappait. Il avait bien vu des films ici et là à l’école mais ça s’était arrêté aussitôt la fin de sa scolarité. Il n’avait jamais plus vu de film et ce n’était pas plus mal. Le peu qu’il avait vu ne traitait que de guerre ou de meurtre, tous n’étaient pas de bons croyants et ne faisaient que péchés sur péchés. Jonas retira à nouveau son chapeau puis secoua la tête. Non. Je travaille à la ferme d’Edenton trois fois par semaine. Et ces terres sont à mon père ainsi qu’à trois autres familles. Ils arrivèrent enfin devant le cabanon. Jonas ouvrit la petite porte en bois et se mit sur le côté pour le laisser entrer. Il n’y avait pas de lumière mais on pouvait quand même y voir. A l’intérieur, seul une personne pouvait se tenir devant un tout petit bureau où il avait juste un annuaire datant de 1980 ainsi qu’un téléphone à cadran gris. Il étira un petit sourire, dévoilant ses dents blanches. Voilà, vous avez des numéros ici, si vous en avez besoin. Jonas désigna de l'index le gros bouquin aux pages jaunies avant de se décaler. Il se mit légèrement en retrait pour laisser à Axel un peu d’intimité pour appeler quelqu’un pour sa voiture.
Toujours ce vous qui t'arrache les oreilles, même les gens avec qui tu travailles ne te vouvoient plus parce que tu leur a fait comprendre non sans lassitude que tu avais horreur de ça, à la manière d'un souverain qui aurait lâché le trône, mais que les gens continueraient d'appeler sire. Tu passe au dessus du fait qu'il ne comprenne pas ce dont tu lui parle quand à ton blackberry, parce que tu ne comprends pas ce qu'il ne comprend pas. Sujet éludé. Mais tu te décompose quand tu arrive devant la cabine téléphonique des pionniers et tu réprimes une violent envie de soupirer et de te mettre à pleurer en te demandant avec violence : mais qu'est-ce que c’est que ça ?! Sans doute est-ce lisible dans le regard que tu adresses au blond, plein de détresse, de questions et ce putain de téléphone à cadran dot tu ne t'es plus servi depuis au moins 25 ans. Là tu réalises que tu ne rentreras jamais chez toi, tu ne connais aucun numéro et ceux que tu possèdes en mémoire dans ton téléphone, dont celui de ton assurance, tu n'es pas foutu de le composer avec ce foutu cadran. "Jonas, excuse-moi, mais..." tu baisses le nez sur ton téléphone et t'assieds sur le siège près de l'annuaire. "Je... Tu veux bien composer le numéro pour moi," là tu lâche un nouveau rire gêné, le rouge te monte aux joues et tu te sens de plus en plus con, serre même les fesses pour qu'il ne soit rien arrivé à ton joli bolide noir. "Je sais pas m'en servir." tu lui avoues alors en te redressant pour aller te planter dehors. "Je te dicte le numéro de téléphone et toi tu le composes, tu veux bien ?" bah t'espère qu'il le veuille bien, si non tu te sais bon pour rentrer à pied comme un connard et prier pour qu'il ne soit rien arrivé à ta tire.
Une fois devant le cabanon, Jonas fit quelques pas pour le laisser un peu seul et pouvoir appeler un de ces gros camions qui arrivaient à tracter une voiture. Il joua avec le bout de sa botte dans la terre avant de relever le nez et de se tourner vers Axel dans un “Hm ?” Sourcils haussés il resta fixe quelques secondes avant de jeter un œil vers la maison puis de nouveau sur Axel. Il n’avait pas le droit d’utiliser le téléphone sans l’accord de son père et évidemment il aurait dû aller lui poser la question, savoir s’il était possible qu’il rende ce service à ce pauvre homme visiblement désespéré sans que Jonas ne puisse comprendre pourquoi. Je… heu… Il regarda de nouveau vers la ferme avant de tourner à nouveau son regard vers Axel. Je n’ai pas le dr… Et à la vue de cet homme aux joues rouges, le blond hocha finalement la tête et s’avança dans la cabine. D'accord. Il posa la main sur la porte en bois et se faufila entre la elle et lui pour pouvoir faire le numéro. Index dans les petites ouvertures, il le fit glisser avant de relâcher pour que le tour soit fait et que le numéro soit effectif. Une fois fait, il se glissa hors de la cabine quand il entendit le son caractéristique du léger grésillement. Voilà, mais ne le dites pas à mon père. Une fois dehors, il observa aux alentours pour s’assurer que personne ne l’ait vu faire. Ce soir il allait décidément devoir prier bien plus qu’à l’accoutumé. Inspiration profonde quand la conversation prit fin, Jonas se tourna vers Axel, encore. Ça va prendre du temps vous pensez ? Si vous avez faim, nous pouvons vous nourrir le temps que le camion vienne récupérer votre voiture, vous savez.
Il hésite et tu réalise que s'il ne t'aide pas, tu vas te taper quelques miles à pieds, rageant intérieurement quand tu imagines qu'il aurait été plus simple pour toi de rentrer directement plutôt que de faire une halte ici, qu'elle perte de temps. Et tu imagines déjà les nombreux messages vocaux laissés par ta fiancée qui va te tanner quand au fait que tu n'étais pas joignable et les associés et autres affaires que tu devais régler ce jour. Sauf qu'il se décide en ajoutant une phrase qui te laisse perplexe : Voilà, mais ne le dites pas à mon père. T'as mal au cul rien que d'y songer, mais il ne semble pas avoir tant d'écart que ça avec toi et tu ne comprends pas bien pourquoi son père ne devrait pas être au courant qu'il a composé un numéro de téléphone, enfin, il était d'accord pour qu'il t'aide Lincoln, où est le problème. Tu ne pipe pas mot, te contente de prendre le combiné et d'expliquer la situation à ton assurance qui t'affirme envoyer, dans les meilleurs délais, une dépanneuse à plateau pour ramener ton bolide dans le garage le plus proche. Ça va prendre du temps vous pensez ? "J'en sais rien," tu lui avoue dans un soupir après avoir raccroché, pensif, tu te dit que regagner ton véhicule serait bien plus sur, que de cette manière le dépanneur pourrait la repérer plus facilement et te ramener par la même occasion. "Jonas," tu articules alors le plus sérieusement du monde en levant ton cul du petit siège de fortune sur lequel tu siégeais. "T'as quel âge dis-moi ?" tu t'enquiers alors en glissant ton téléphone dans ta poche arrière avant de faire craquer ta nuque. "T'as pas 72 ans, moi non plus, donc on peut se tutoyer en restant respectueux." c'est imposé, froidement et quand tu le réalises tu secoues légèrement la tête. "Merci, merci d'avoir appelé pour moi et désolé d'être aussi agressif, mais c'est que, je-j'aime pas ça, qu'on me vouvoie, ça me fait penser à mon père et moi, je suis pas encore vieux." Et si t'as faim alors ? Là tu le sens moyen, t'en voudrait d'abuser de leur hospitalité, puis l'idée qu'ils te droguent pour te bouffer dans leur ragoût du soir te fait flipper, un peu. "Non, je n'ai pas faim et..." t'as remarqué le regard de sa mère à lui qui te faisait clairement comprendre que tu n'avais rien à branler dans leur ferme. "Je m'en voudrais d'abuser de ta gentillesse, je pense que..." tu te racles la gorge alors en massant ta nuque. "J'pense que je devrais retourner près de ma caisse pour attendre le dépanneur." lents hochements de tête "Tu veux bien m'accompagner ?" as-tu demandé d'une petite voix, alors quoi Axel, t'as peur de te perdre ? Sa présence te rassure ? Hehe.
Inspiration profonde alors que l’inconnu s’était tourné vers lui après avoir raccroché mais ce qui le frappa le plus fort c’était bien son ton condescendant. Non il n’avait pas 72 ans et il allait encore moins lui répondre à sa question pas franchement très polie. Il fronça légèrement les sourcils puis baissa les yeux sur ses bottes avant de se dire qu’il allait le laisser là, qu’ils en avaient fait suffisamment pour lui. Bras croisés autour de son torse il releva le nez, se suggérant qu’il était peut-être préférable de ne pas lui mettre dans la tronche que son comportement était presque limite. Et pourtant : Je n’aime pas qu’on jette ses affaires par terre et pourtant je ne vous ai pas manqué de respect, monsieur. Il inspira profondément avant de souffler par le nez. Après tout, il n’avait pas tort non ? Très bien je ne vou… Je ne te vouvoierai plus. Il hocha la tête. S’il ne voulait pas manger qu’il en soit ainsi. De toute manière sa mère ainsi que son père n’auraient pas aimé qu’il puisse avoir ce genre de comportement au sein de leur maison. D’accord. Jonas s’apprêtait à rentrer chez lui quand la question d’Axel le figea dans son geste. Il marqua un petit temps avant de finalement souffler un petit oui et se mettre en route vers la voiture de monsieur. Ils marchèrent sans un mot durant un long moment puis finalement le blond soupira en remettant son chapeau de paille sur la tête. Pardon, je ne voulais pas être impoli tout à l’heure. Je n’aime pas qu’on m’agresse comme ça. Jonas enfonça ses mains dans ses poches sans oser regarder le brun à côté de lui.
Pardon, je ne voulais pas être impoli tout à l’heure. Tu lèves le nez vers lui en te mordant les lèvres et c'est à peine si tu lui en veut, parce qu'il n'avait pas tort sur le fait que tu ne t'étais bien comporté avec ton mégot de cigarette et que tu as ajouté une couche à tout ça en t'emportant, un peu. Je n’aime pas qu’on m’agresse comme ça. "J'aime pas mon père," tu lui avoues alors en te mordant les lèvres, lâche même un rire sec avant de regarder droit devant toi. "Mais tu pouvais pas le savoir." tu as haussé les épaules, dure entrée en matière que tu lui fais, mais le vouvoiement te crispe parce que là d'où tu viens, ils se vouvoient tous et tu t'es fait une joie tout au long de ta vie de ne plus employer ça pour personne, sauf peut-être la reine Elisabeth, que dieu la garde inch'allah. Enfin de manière générale, tes parents ne t'aiment pas et tu le leur rend bien, pour faire court parce que si non va falloir expliquer pourquoi et même dans ta tête c'est trop long, tu balayes la pensée d'un mouvement de menton. "Désolé d'avoir pollué ton sol," tu ajoutes alors en te redressant un peu, conscient que le chemin qu'il vous reste à parcourir est long et que d'ici deux minutes tu vas cracher tes poumons parce que tu parles en marchant. "J'ai le droit de fumer si je ne jette pas le mégot par terre ?" tu lui demandes alors en riant à demi, lui tend ta main pour qu'il se débarrasse enfin du premier mégot qu'il a ramassé un peu plus haut sur le chemin.
Reprise du chemin vers la voiture. Une petite balade avant de finalement manger ne lui ferait pas de mal en fin de compte. Alors, mains dans les poches ils reprirent la route tous les deux. Il tourna la tête vers Axel tandis qu’il commençait à l’aider à reconstituer le puzzle qu’il était. Il n’aimait pas son père et par conséquent le vouvoiement devait venir de lui. Jonas avait légèrement du mal parfois avec son paternel mais ça ne l’empêchait pas de l’aimer quand même. Ils étaient proche et même si aujourd’hui il avait semblé froid et distant avec cet inconnu, il n’en restait pas moins quelqu’un qui avait pris soin de chacun de ses enfants, selon le troisième enfant de la famille. Il secoua simplement la tête. Non il ne pouvait pas le savoir. Tu vouvoyais ton père ? Il haussa les épaules puis secoua la tête. Le tout c’est que tu ne recommences plus. Puis Jonas étira un petit rire dans un souffle avant d’hocher la tête et de lui tendre le mégot qu’il avait ramassé un peu plus tôt. Tu peux. En ouvrant ses doigts, Jonas put sentir qu’ils sentaient la cigarette et nul doute que sa mère allait lui ordonner de se laver les mains en frottant fort avant de pouvoir passer à table. Elle est jolie ta voiture au fait. Il inspira profondément. J’en ai jamais vu des comme ça en ville. Elle est unique ? Jonas n’était jamais sorti au-delà du comté alors des voitures il en avait pas des masses en tête. Lui qui n’avait jamais conduit, ça lui semblait bien étrange encore plus quand une voiture ne ressemblait à aucune autre.
tu vouvoyais ton père ? tu prends là une profonde inspiration en esquissant un sourire amer avant de lever le nez vers le blond, là tu déglutis et hoches la tête avant de te remettre à fixer un point imaginaire en prenant une profonde inspiration. Pauvre môme dont les parents ne se sont occupés que sommairement, ont exhibé comme l'objet d'une réussite qu'ils s'imaginaient avoir atteinte, mais qui s'est retournée contre eux. "Merci," tu souffles alors en tirant de ta poche ton paquet de clopes, en tire une du bout des dents et l'allume avant de ranger le tout là d'où ça venait. "Tu trouves ?" tu demande en recrachant la fumée, sourire qui étire finement tes lippes, parce que ton bolide c'est ta perle, t'as mit le prix, mais tu ne le regrette pas et tu la trouve juste magnifique. "C'est une Dodge Challenger de l'année dernière, je ne m'y connais pas en automobile, mais quand je l'ai vue j'ai su que je la voulais." tu lâches alors un rire à sa question, si elle est unique, certainement pas, toujours est-il qu'en ville tu n'en as pas croisé. "Elle est unique parce qu'elle est à moi," tu plaisantes alors, conscient qu'un tas d'autres modèles similaires ont certainement été vendu sur le territoire et même ailleurs. "Tu voudras l'essayer ?" proposition posée là, alors que tu inhale une bouffée de nicotine, rassuré de la retrouver sans qu'il ne lui soit rien arrivé.
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