outfit • • Lorsque j'ai reçu l'appel du vieux père Rhodes, j'me suis même pas posé de question avant d'embarquer mes outils et d'prendre ma bagnole pour me rendre sur la ferme. J'suis pas spécialisé dans l'équipement de ferme, mais à force de venir ici, j'me débrouille plutôt bien maintenant. J'débarque à la ferme, me gare comme à mon habitude et me rend directement à la grange, m'attendant à y trouver Edward. So Eddy, what's wrong with it this time? J'me stop net dans mon élan te voyant assit là, l'air plus maussade que jamais. J'te regarde de la tête aux pieds, sourcils froncés. Where's Eddy?

@Jayden Rhodes

outfit -- Grognement. Protestation. Marmonnement. Tout y est passé. En vain. Il a fini par céder et par accepter de rester à la ferme le temps que son paternel aille chercher sa mère en ville. Et le temps pour eux de faire une dernière course. Temps approximatif de son absence : inconnu. Temps de l'exaspération de Jayden : à son paroxysme. La ferme ce n'est pas son truc même s'il vient aider de temps en temps. Les machines agricoles encore moins. Alors faire le poteau en attendant l'arrivée d'un mécano que son père connait et qui lui fera la réparation sans doute à moindre prix, c'est le summum. La cerise sur le gâteau. Ou le pompon. Bref, il est là, dans la grange à tourner en rond, venant tout juste d'écraser une cigarette deux minutes auparavant et se décidant enfin à poser ses fesses quand une voix retentit. Il admirait ses chaussures quand son corps se raidit en reconnaissant la voix. Sa tête se relève lentement. Putain.. Fais chier.. Bordel de merde.. Tout y passe dans sa tête. Même une envie directe de le frapper. Il lui demande où est Eddy. Il appelle son père par son diminutif. Voilà qui le contrarie davantage car cela sous entend qu'ils se connaissent un minimum et cela le dérange sans qu'il ne l'explique. Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Retrouvailles charmantes. Le ton est donné. Les recommandations paternelles d'être sympa avec le mécano volent en fumée.

J'comprends pas très bien c'que tu fous là. Tu bosses ici? Ce serait nouveau parce que je t'ai jamais vu dans le coin auparavant. Bien sûr, quand je demande où est le proprio, tu me réponds avec autant se gentille qu'il y a de soleil aujourd'hui: aucun. I'm here cause he called me, not to play bigger dicks with you. J'ai pas envie d'me prendre la tête avec ton attitude de merde et juste parce que t'es étrangement craquant dans ce sweater de laine ne veut pas dire que j'suis attendri pour autant.

Les hostilités sont ouvertes. Il se sent déjà lancer pour faire des dégâts, beaucoup de dégâts même, que ça soit d'un côté comme de l'autre. Cela ne fait que quelques jours mais il a encore bien en mémoire ses lèvres sur les siennes, et ce qu'il a ressenti quand son poing s'est collé sur son visage. Il la sent une nouvelle fois, cette rage. Et s'il est prêt à en découdre, cela ne semble pas être le cas de son adversaire qui lui rappelle la raison de sa présence. Il a alors une pensée pour son père. Pour le comportement qu'il adopte à cet instant. Et à celui que ses parents connaissent plus ou moins. Son poing se serre alors qu'il se lève, faisant blanchir les jointures de ses doigts. On peut croire qu'il va se précipiter sur lui pour porter le premier coup. Il n'en fait pourtant rien. Fais ce que t'as à faire dans ce cas et tire-toi. Et ainsi lui également pourra se tirer pour rentrer chez lui. Il désigne d'un signe de tête le tracteur, celui souffrant de tous les maux et qui refuse de démarrer depuis le matin.

Ton attitude devrais me laisser de glace, mais pour une raison que j'ignore, tu réussis à toucher une corde sensible. Peut-être parce que je n'ai été rien d'autre que sympa avec toi dès le départ et que ta façon de me remercier est de me traiter comme de la merde (après avoir insulté ma soeur). Ou peut-être parce que j'vois au-delà de tout ca le potentiel que tu pourrais avoir si tu t'en donnais la peine. Éternel optimiste Duncan. Tu bouges et j'me dis que c'est le moment où tu viendras me foutre ton poing à la gueule. J'serais pas surpris le moins du monde. Sauf que personne a dit que cette fois j'te laisserai faire. Don't need your blessing, but thanks. Sourire forcé, je me dirige vers la bête et commence à en analyser l'moteur. Quelques minutes de silence et c'est plus fort que moi. Why are you here anyway?

Un tracteur. Un mécanicien. Un inspecteur des travaux finis. Et une grange. C'est la scène atypique de cette rencontre. Lui se tient à bonne distance, ne s'intéressant pas le moins du monde aux problèmes de l'engin. Hors de question de se rapprocher. Il enfonce les mains dans les poches de son jean, se retenant par la même occasion de glisser une cigarette entre ses lèvres. Par politesse, il devrait lui en proposer une et cela l'écorcherait de le faire. Il ne sait même pas s'il fume. Cela ne l'intéresse pas de le savoir d'ailleurs. Il semble de nouveau un peu comme un lion en cage dans cette grange. Il fait quelques allers-retours, sans jamais se rapprocher. Ses prunelles glissent de temps à autre sur la silhouette affairée sur le tracteur. Chacun est affairé de son côté - une blague pour lui - quand l'autre finit par craquer. Il s'arrête alors de faire les cent pas. Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Écho d'une phrase prononcée un peu plus tôt. Tellement conscient de le faire que l'ombre d'un sourire s'esquisse au coin de ses lèvres. Une chose rare chez lui. Va-t-il lui répondre sur la raison de sa présence dans cette ferme. Il pourrait inventer n'importe quel mensonge que ça pourrait paraître crédible. Il hausse légèrement les épaules. C'est mon héritage que tu répares. Encore une blague car il ne veut pas entendre parler de cette ferme. Mais au moins, il a une vraie réponse à sa question.

Encore ces mots acerbes plein de venin. Je grimace en secouant la tête, ne t'octroyant pas même un regard. Tu l'mérites pas. Tu marques un point ceci dit. Qu'est-ce que ça peut bien m'foutre de savoir pourquoi t'es là à ronger ton frein rien que parce que t'es tombé sur moi? Tu m'offres malgré tout une réponse. Vérité ou mensonge? Personne ne le saura jamais au fond. So you're Eddy's son? Je renâcle, riant pour moi-même en secouant toujours la tête. Intéressant. J'ai entendu parler d'toi auparavant Jay, j'savais juste pas que t'étais l'ingrat qui renie c'que sa famille lui offre.

Les mots sont à peine sortis qu'il le regrette déjà. Ce n'est pas un scoop qui peut rapporter de l'argent. Personne ne s'intéresse à cette information. Et pourtant... Avouer à demi-mots qu'il est le fils Rhodes, c'est en quelque sorte ouvrir une porte sur qui il est. Cette révélation a pour effet de le faire rire. Ses mains se crispent dans ses poches. Il lui lance un regard mauvais, ne répondant rien. Il est contrarié car il y a trop de facteurs inconnus à cet instant. A quel point il connait son père ? Première question, mais déjà une seconde est formulée. A quel point son père a été bavard sur son sujet. Qu'il soit mentionné comme le fils prodigue qui renie son héritage ne lui fait ni chaud ni froid. Mais son père, ou même sa mère, ont-ils mentionné Jill à cet homme ? Son ancien métier ? Les pertes auxquelles il a été confronté ? C'est autant de questions sans réponse qu'il ne peut poser car il est hors de question pour lui d'aborder le sujet. Il peste intérieurement. Contre son père. Au point de donner un coup de pied dans un petit caillou qu'il avait à sa portée. Il a un problème de colère et de contrôle, ce n'est pas une nouveauté. T'en as pour longtemps ? marmonne-t-il en rageant à moitié.

J'paris que ton cerveau fonctionne à plein régime là, pas vrai? Que tu te demandes c'que j'sais et n'sais pas à ton sujet? Que tu te demandes pourquoi, comment et depuis combien d'temps j'suis proche de ton père, de ta famille tout court même. Sauf que j'compte pas t'le dire. J'compte pas t'donner cette satisfaction là. That explains alot. Une couche de plus. Si j'en ai pour longtemps? Depends. Might need help. Wanna lend me a hand or should I call someone? That could take a while if I have to wait for a collegue... Je me redresse, prenant appuis sur le tracteur en essuyant mes mains sur le linge que j'ai constamment dans ma poche arrière quand je bosse.

Froncement de sourcils. Comment ça explique beaucoup de choses ? C'est à dire ? Connard. Il ne poursuit pas. Il le fait exprès pour le faire rager davantage. Et il sait qu'en se taisant à cet instant, il le fait rager. Chaque minute en sa présence lui donne de plus en plus envie de le plaquer contre un mur. Et de lui faire cracher ses tripes. Il n'y a peut être pas que ça mais il refuse d'y penser et encore moins de se l'avouer. Alors, face à cette colère qui s'exprime trop clairement, il lui pose la question de la durée pour la réparation. La réponse le fait réfléchir. Mettre son nez dans un moteur de voiture ne l'a jamais dérangé. Mais là, il est question de tracteur. Et surtout de l'aider lui. Il fait quelques pas sur le côté en le fixant. Il semble aussi calme que lui bout. Au bout de quelques secondes, il finit par sortir les mains des poches de son jean, en soupirant bruyamment. Ok. Il a du prendre sur lui rien que pour prononcer ce mot. Il se rapproche du tracteur, remontant les manches de son pull. Qu'est-ce t'as besoin que j'fasse ? Et qu'il ne lui réponde pas de se la fermer car il lui en collera une sans sommation.

Je ne m'attends à rien en particulier de ta part et, pour être honnête? Je n'ai pas non plus réellement besoin de ton aide. J'pourrais très bien terminer seul, mais lorsque tu finis par accepter, j'suis tellement surpris que j'me vois pas t'admettre la vérité. Profite-en. Tu t'approches, visiblement radoucit alors que tu remontes les manches de ton pull. Je replonge à tes côtés, pointant une pièce. Hold this while I screw this back in place. J'attrape l'outil dont j'ai besoin et viens m'exécuter non sans te jeter un ou deux coup d'oeil. T'es aussi beau que dans mon souvenir de près. C'est dommage que tu ne souris jamais, ça te donne l'air beaucoup plus vieux que tu ne dois réellement l'être.

Manches retroussées, il réduit son espace vital en se rapprochant du sien. Fichu tracteur. Fichu paternel. Sa mâchoire est contractée quand il se penche pour regarder ce qu'il veut qu'il fasse. Il s'exécute en silence, soutenant la pièce d'une main. Ses prunelles se perdent sur la mécanique du tracteur même s'il les sent. Ces coups d’œil tournés dans sa direction. Au premier, il fait comme s'il n'a rien remarqué. Au second, il commence à s'agacer. Au troisième, il se décide enfin à relever le regard pour croiser le sien. Il le fixe sans rien dire. Un mot franchirait ses lèvres, il serait acerbe. Et il n'y a nul besoin que ses lèvres se mettent en mouvement. Ses prunelles sont suffisamment expressives. Une lueur de défi. Avec cette colère toujours présente derrière. Cette recherche de la moindre occasion pour le frapper. C'est comme s'il lui crie silencieusement de lui offrir sur un plateau une raison de s'emporter et d'évacuer tout ce qu'il accumule.

Tu obtempères, tenant la pièce sans même poser de question. Tu dois vraiment rien y connaitre pour ne pas remettre en question mon besoin d'une seconde paire de main pour un truc aussi banale. Je prends mon temps, te pointant différentes pièces et te donnant différentes directives pour que tu restes près d'moi. Ça m'permet d'te regarder discrètement. Ou alors pas si discrètement que ça puisque tu lèves les yeux à ton tour. Tes billes azures accrochent les miennes et je soutiens. J'm'attends à un commentaire, à une remarque, à un coup peut-être même sans les mots qui vont avec. Rien ne vient. Une lueur naissante. Défi. Provocation. Tu t'y remets. J'avale de travers, ma langue glissant sur mes lèvres pour les humecter et mon pouce vient gratter mon front, y laissant une trace de graisse bien noire. Qui es-tu Jayden Rhodes?

Il ne détourne pas une seule seconde ses prunelles. C'est comme une bataille à mort pour laquelle il refuse de perdre. Cela fait depuis bien longtemps qu'il n'a plus rien à perdre. Peut-être même depuis trop longtemps et il ne s'en rend pas compte. Cette lueur, c'est celle qui l'a accompagnée durant les six dernières années durant lesquelles il a parcouru le monde. Ses fesses ont chauffé. Il a frôlé la mort plus d'une fois. Pour une photo immortalisée. Mais l'excuse est-elle plausible quand lui même savait ce qu'il faisait et que par moment, il a regretté que la mort ne l'emporte pas, le narguant de sa lâcheté à passer à l'acte et à attendre. Alors, ce duel de regards, ce n'est rien à côté de tout le reste. Ce n'est rien à côté de cette langue qui glisse sur des lèvres. Il immortalise ce geste, ses yeux lui servant d'objectif. Est-ce qu'ils vont jouer encore longtemps à ce jeu ? Sa fierté le retient, pourtant il veut savoir ce qu'il sait à son sujet. Cela le rend dingue. Au point de retirer ses mains du moteur du tracteur. Réaction infantile. Il ne veut rien lui dire, qu'il se débrouille. Il recule de deux pas, s'essuie les mains sur son jean. Son regard se détourne, avant qu'il ne replonge les mains dans ses poches, sans un mot. Une spécialité chez lui. Wade en a fait les frais quelques jours plus tôt mais il a été assez con pour être patient.

Joute de regard, j'arrive pas à détourner le miens. Regarder ailleurs et baisser les armes? Nah. C'est pour les faibles ça et j'suis pas faible moi. Fierté mal placée. J'voudrais ouvrir la gueule pour parler, dire un truc brillant, drôle, provocateur, n'importe quoi pour pouvoir entendre ta voix à nouveau. Mais tu dis rien, tu t'refermes, tu abandonnes. Tes mains quittent le moteur et tu te détournes. Au diable ton jeans apparemment. Tu replonges les mains dans tes poches et me tourne le dos. Merde. Je me maudis intérieurement et dépose mes outils. Tu compte faire quoi Duncan? J'approche et pose une main sur ton épaule. Hey.. something wrong?