"L'apnée ?" répéta la jeune femme en fronçant les sourcils, mécontente que cela vienne sur le tapis, retenir sa respiration le temps de regagner la surface de l'eau dans la piscine n'était pas bien compliqué pour elle, mais la retenir plus longtemps, elle ne s'en sentait pas capable. S'imaginait-elle qu'après une demi heure de leçon ils allaient jouer dans l'eau comme deux gamins insouciants ? Oui, elle l'avait espéré, un peu. Comment te sens-tu par rapport au fait de mettre la tête sous l’eau les remous provoqué par les battements de ses jambes cessent alors qu'elle repose ses pied au fond, sur le carrelage. "Jack, je pensais que tu avais préparé tout un programme pour ce matin moi," s'indignait-elle en se dressant sur ses jambes, regard brun qui s'abat sur le marin comme la foudre qui frapperait un arbre en pleine tempête. "J'en ai marre, j'ai les doigts tout mous." décrète t-elle en tournant simplement le dos à l'ancien militaire avant d'entreprendre de sortir du petit bain par l'échelle.

Jack avait lu quelque part que jusqu’en 1979, les ouragans étaient baptisés avec des prénoms uniquement féminins, en raison d’une croyance populaire qui affirmait que les humeurs des femmes étaient aussi imprévisibles que les tempêtes et les ouragans. Bien que les temps aient clairement changé et que ce genre de sous-entendu sexiste n’était plus actualité, Jude Klopfenstein était l’incarnation même de cet ouragan. Du calme joyeux, elle venait soudainement et sans crier gare de se transformer en une petite tempête qui s’apprêtait à tout emporter sur son passage en sortant du bassin. « Jude. » essaie-t-il calmement de la raisonner, lassé de la voir une nouvelle fois lui tourner le dos et de se voir à nouveau lui courir après. C’est pourtant ce qu’il fait, ce vieil ours mal léché, et pourtant il aurait probablement envoyé chier n’importe qui d’autre. Mais comme il l’avait prévenu, si elle acceptait de rester à la station, elle ferait partie de son équipage. Et bien qu’il attendait beaucoup -probablement trop- des hommes et des femmes sous ses ordres, il était également prêt à tout pour eux. Jack parvient à la rattraper avant qu’elle n’arrive à l’échelle, lui attrape la main et la tire pour qu’elle l’affronte, plantant ses yeux dans ses prunelles brunes. « Y a pas de programme. » lui avoue-t-il benoîtement. « Y a pas de programme parce que je suis pas un foutu prof de natation. Y a pas de programme parce que je dois d’abord savoir quel est ton niveau. Y a pas de programme parce que je veux d’abord te faire passer ta peur de l’eau. Parce que quand tu seras dehors, toute seule et que tu devras aller chercher un macchabée dans son putain de voilier à moitié chaviré, tu devras y passer.Tu veux nager ? Vas-y, le bassin est à côté. Découvre par toi-même. De toute façon, tu fais toujours mieux que tout le monde. » conclut-il en pestant en haussant les épaules. « Et si tu veux y aller, tu connais la sortie … »

Il l'interpelle et ce serait mentir que d'affirmer qu'elle n'a pas entendu sa voix raisonner dans la salle, mêlée aux clapotis de l'eau, sans se retourner, résolue à sortir de là, par lassitude. Un caprice oui, rien de plus. S'il se saisit de sa main et l'attire à lui elle la reprend immédiatement en fronçant toujours les sourcils, protestant quelque chose qui sonne comme de l'allemand, mais qui n'en est pas ; dialecte amish pour exprimer son mécontentement quand à la façon qu'à le quadragénaire de la forcer à rester dans le bassin. Ingrate, un peu oui. Elle se se rend pas compte de l'organisation autour de tout ça, la natation, de l'investissement de Jack dans l'affaire. Pas de programme. Elle le toise sévèrement en prenant une profonde inspiration, contrariée, impatiente même. "Bien, je n'ai pas peur de l'eau, j'ai peur de me noyer !" soulève la jeune femme en levant son index, façon geignarde de souligner une nuance qui n'en est pas vraiment une, si ? Puis arrive alors la vexation, sentiment qu'il la prend de haut alors qu'il lui indique le grand bain, là où elle n'a pas pieds, elle s'offusque la gosse, serre la mâchoire alors que ses narines tressaillent sous la colère qu'elle ressent. De toute façon, tu fais toujours mieux que tout le monde. Le coup part tout seul, elle vise les côtes tuméfiée en suivant les traces laissées sur la peau et son poing s'y plante alors qu'elle grogne. "Tu vois ! Tu vois ?!" s'exclame t-elle avant de le pousser du bout des doigts. "Tout le temps, tu passes ton temps à me prendre de haut, c'était comme ça déjà avant... Avant !" s'indigne la jeune femme qui semble croire que le marin prend plaisir à la tourner en ridicule, s'amuse à la vexer dès qu'il le peu. "Une fille de petite vertu dans un bar, une madame je-sais-tout dans un bassin, j'ai juste dis que j'en avais marre et que mes doigts étaient tout mous !" de nouveau elle s'approche de lui en battant l'eau avant de le pousser de nouveau. "Puis... J'ai pensé que tu aurais préparé quelques chose, j'ai regardé des vidéos youtube toute la nuit pour me préparer..." dit-elle d'une petite voix en soufflant du nez.

Le coup part et Jack ne le voit pas venir. Il se sera fait attaquer deux fois en même pas deux jours. Ce ne sont pas des cours de natation qu’il faudrait donner au vieux marin, mais bel et bien des cours de boxe ou de self-defense. Murdoch en a le souffle coupé et si la côte n’avait pas été cassée par le flic, elle en avait été grandement fragilisée et l’était peut-être désormais grâce à l’énervement de la jeune sauveteuse. Plié en deux, le marin tentait de retrouver sa respiration, serrant ses poings en n’écoutant qu’à moitié les explications foireuses de la blonde. A croire qu’elle passait son temps à se plaindre. Jack finit par se tenir droit à nouveau, le visage tordu par la douleur et radicalement différent de celui qu’il avait pu présenter jusqu’à maintenant. « Je te prends pas de haut, je t’ai juste donné ta chance. » dit-il amèrement, une nouvelle fois déçu par le comportement de la blonde. Murdoch avance vers elle, la contourne et sort du bassin en se hissant sur le rebord de la piscine. Sans un mot, il part chercher sa serviette et se dirige vers les vestiaires en se tenant sa côte blessée. Une petite douche rapide et il est déjà en train de se changer, sans se soucier de ce que peux bien fabriquer sa coéquipière. Avec ce nouveau coup dans les côtes, il ne parvient même pas à enfiler ses vêtements et se contente de sauter dans son pantalon et dans son blouson, qu’il ferme difficilement. Une fois sorti de la piscine, le marin se cale une clope au bec et se dirige gueule fermée vers son pick-up. Jude ? Elle pouvait rentrer à pied, il en avait sa claque d’être pris pour un con.